"Pour en savoir plus sur les tensions entre les mots développement et durable on peut se reporter à ce rapport québécois qui fait une bonne présentation. Evolution conceptuelle et historique du développement durable.
Le développement durable Pour qui se promène dans le territoire, on peut constater de cruelles morsures dans nos bois et bosquets. Ainsi, sur la route de Gesté à Villedieu, dans un espace boisé du côté de Saint-Philbert-en-Mauges, d'immenses tas de bois s'amoncellent au fur et à mesure que des pans entiers de forêt sont déboisés. Cette situation n'est pas isolée ; elle se répète à travers la campagne, où l'on voit disparaître des haies, des bosquets, des boisements anciens, au profit d'une exploitation intensive qui commence à marquer le paysage. On pressent dans nos campagnes les incidences d'un détournement de certaines bonnes idées de l'écologie. Elles se répercutent sur les populations rurales, entre autres, qui subissent de plein fouet cette logique. Les « bénéfices » se concentrent dans les villes, où l'on se félicite de la « transition énergétique ». Le premier des ravages, c'est le vocabulaire, ou plus exactement les « éléments de langage » ; celui qui tourne autour du développement durable. On s'appuie allègrement sur ce concept devenu slogan, sans jamais s'interroger sur ses conséquences réelles. Ainsi, on construit d'immenses chaufferies au bois dans des quartiers nantais, ou l'on installe de plus petites, par exemple dans les collèges (à remarquer que ce sont les collectivités territoriales qui sont à l'œuvre). L'argument des initiateurs est que le bois est une source renouvelable. Ce qui est vrai et est faux à la fois. C'est vrai au regard de l'histoire longue : la Terre n'est pas près de recréer ses stocks de pétrole, alors que la forêt, d'une façon ou d'une autre, finira bien par repousser. Mais c'est faux du point de vue de l'histoire d'un homme : les saignées opérées actuellement mettront bien trente ans à disparaître et à retrouver une valeur écologique équivalente. Entre-temps, de quoi faudra-t-il se contenter ? De paysages défigurés, de milieux appauvris, d'une biodiversité en recul. Non, la ressource bois ne relève pas du développement durable. Elle repose sur le même principe que le prélèvement du pétrole : on prélève, et on verra bien après ! C'est une logique de court terme qui ne tient pas compte des cycles naturels ni de la fragilité des écosystèmes. On surexploite aujourd'hui, au nom d'un hypothétique équilibre demain. Comment croire qu'après un tel prélèvement, la repousse va se faire dans les mêmes conditions ? À moins de ne planter que des espèces cultivées pour leur rendement, ce qui revient à transformer la forêt en champ d'arbres, à la manière d'une agriculture industrielle. Replanter des arbres de culture, c'est modifier durablement les paysages et les écosystèmes. C'est appauvrir les sols, réduire leur capacité à capter l'eau, et fragiliser les milieux face aux aléas climatiques. Les forêts nouvelles ne seront pas à l'identique des forêts anciennes, avec leur diversité d'espèces, leur complexité écologique, leur rôle de refuge pour la faune et la flore. Ce qui est perdu en matière de paysage, en matière de promesse, en matière d'imaginaire, l'est pour toujours. Non, la ressource bois ne relève pas du développement durable. Le développement durable n'est qu'un alibi qui permet un glissement vers d'autres gisements d'énergie, qui permet à d'autres secteurs économiques de se développer.